Laissons la parole à notre amie ‘tomette qui a participé à la fameuse « One Eleven » …
Ca commence toujours par une histoire de « je conduirai la voiture » ! Mais faire près de 1500 km de voiture sur le week end pour lire un bouquin à l’étranger, c’est un peu pathétique non ? Faut vraiment ne rien avoir à faire de sa life !
3 options :
20km : les 20 derniers, en fait 350m de dénivellé absolu avec des mini descentes au milieu
35km : les derniers encore. ils appellent ça funny, genre 15 km de bobosses et on enchaine sur les derniers 20km
70km : toujours et encore les derniers. on perd l’intérêt des premiers 40km de « descente »
111km : la totale.
J’hésitais entre 20 (en quad), 35 et 70 (en line).
J’ai sorti mes lines 3 semaines avant pour faire 50km lors d’une balade entre potes. Horreur, malheur : je ne savais plus tenir mes carres, plus de jambes à 30km.
Ok, on va dire c’était sur route mouillée ou/et graton. Mais comme dit l’un de ces potes : « et tu veux faire la One-Eleven ? » c’est dire ma condition physique du moment.
J’ai quand même tenté 2 sorties de 55km en line la semaine précédente mais on ne peut pas parler de préparation, juste une révision des appuis oubliés en line et aucun entrainement d’endurance depuis … plus d’un an.
Poussée par quelques loustics sur place, une dernière étude du profil de la course, le prix de 70 étant le même que 111 (la veille de la course), j’ai pensé que je pouvais me faire une course à moi toute seule : un 35km (les premiers qui descendent par exemple) et après ça, éventuellement les 70km, et ce serait bien suffisant. J’attenderais le bus ensuite.
Il faudrait d’ailleurs que j’en touche deux mots aux organisateurs. Il faudrait qu’ils proposent un 40km et un 70km voire 90km mais en ne prenant que le début.
Nuit collective (dans les 150 personnes par salle) en gymnase sur des matelas confortables ma foi. Extinction des feux à 22h, allumage à 4h30.
A 10 minutes du départ, bruine ridicule mais inquiétante. La descente sur du mouillé, c’est moins rigolo.
Ma question rituelle au départ des FIC revient : « mais qu’est-ce que je fous là ».
On laisse les élites et les nationaux partir devant, ben oui, sinon, ils n’ont aucune chance
Départ dans la masse, je m’installe dans un rythme de fille pas réveillée, même pas pour manger son petit déjeuner. Je me suis tout de même forcée en y allant doucement.
Les patineurs s’organisent en peloton, j’en rejoins un, à l’abri derrière un type balèze et qui patine bien droit. Le premier se fatigue, personne ne prend le relais. Bon bah, je ne fais que les 30 premières bornes, je vais m’y coller. Ya quand même un gars qui a eu la honte et qui est venu me relayer aussitôt, c’est rigolo.
Je vous passe la valse des pelotons de début de course sur route bien mouillée. Je reste prudente car mes roues sont biseautées, je ne maîtrise pas encore trop mes carres et aucune maîtrise du niveau de patinage des autres dans ces circonstances.
Arrive la « méchante » descente que les super champions craignent quand elle est mouillée (parce qu’ils vont vraiment vite eux), y a même un tapis sur le côté pour que les moins bons ne prennent pas trop de vitesse.
Grosse grosse déception, même pas eu peur, j’ai pas frolé les gros matelas côté ravin dans les virages et surtout elle est très très courte, genre plus courte que la descente du paris versailles après la côte des gardes. et en 4*100, comme ça dépote, plus on va vite, plus le temps est court
Si je la refais, je pourrai la prendre plus vite.
Bon bah, si c’est ça, chuis déçue déçue, bon ben 20km, c’est pas bezef finalement. Allez je continue, et flute, après la descente, y a une .. côte … Ceux que j’ai enrhumés dans la descente me scotchent dans la montée, rien de neuf sous le soleil qui pointe.
Donc, je commence là ma course solitaire.
Petit rattrapage d’un gars qui cause allemand.
J’essaye de me protéger du vent mais il est maigrelet le garçon. Puis il patine à une fréquence trop élevée, ça va me griller, et lui aussi d’ailleurs.
Je lui passe devant, je lui parle en français mais surtout en exagérant ma poussée en basse fréquence, je lui repasse derière, je le pousse, le gars comprend, bref, je lui ai fait « le roulage en peloton pour pour sourd et muet » et ça marche.
Tout soudain, mon patin gauche fait tac, tac, crrr crrr.
J’étais persuadée que c’étaient les roulements parque malgré wd40, je partais avec deux roues tournant 3 tours max. Je me suis donc dit qu’entre la route mouillée du début et les bonnes descentes, ils avaient été achevés.
Je me dis « et crotte, mes roulements neufs sont dans mon sac au gymnase … suis-je sotte,la course va s’arrêter par incident mécanique, c’est trop balot mais ce n’est pas moi qui choisirait où je vais m’arrêter ».
Autant vous dire qu’en partant pour une longue distance, il ne faut pas avoir peur de se parler à soi-même, même à l’intérieur de dedans sa tête, ça occupe.
Autant vous dire également qu’il vaut mieux partir avec un matériel vérifié ce que je pensais avoir fait dans une certaine mesure.
C’est pas le tout, mais je risque quand même la gamelle. Du coup, je lève le pied et surtout je me désolidarise du ptit gars quand ça finit par faire trop de bruit.
Je profite donc maintenant du paysage, de la campagne suisse, un coin où il y a des vergers, des serres de fraises qui parfument quelques mètres. Je n’ai pas vu de vaches mauves. Je passe à côté d’une mongolfière en forme de chateau volant, non, ce n’est pas une hallucination .
Des enfants aux plus âgés, les autochtones sont installés tout le long du parcours, assis sur des chaises ou pas et qui encouragent tout le monde : « hop hop hop » (traduc: « allez vazy mon gars/ma fille » en suisse.)
Quelques kilomètres plus loin, je me décide à prendre mon mp3.
Bien m’en a pris car je ne patinais plus, roue libre sur du plat en train de choisir ce que j’allais écouter quand je me suis trouvée bloquée net.
Un joint de dilatation en pleine campagne ? deuxième essai, troisième essai, non c’est mon patin !
oki, je vais enlever une roue, surprise, ce n’est pas celle à laquelle que j’attendais qui est bloquée.
Axe en train de sortir. je retente de rouler, non plus ! oki, de mieux en mieux. Ah mais voilà donc !
J’ai perdu l’axe d’une autre roue.
…
cherchage de l’axe,
…
trouvage de l’axe !!!
…
remontage de l’axe car, j’avais oublié mes roulements de dépannage mais pas ma clé !
Cet axe n’était pas serré à fond au départ, sinon, ma roue ne tournait plus … mais curieux, pas de pavés, pas de freinage.
Et c’est reparti, plus de crrr tac tac.
Le circuit est fait de plusieurs boucles. à 4 ou 5 reprises,les chemins s’écartent pour revenir au même carrefour un peu plus tard.
Je ne sais plus à quel km mais ce qui est très rigolo, c’est que j’ai croisé le peloton de tête. Ils avaient déjà fait la majorité du circuit, ils leur restait 35km je crois, je venais tout juste de les faire ! Je m’arrête deux secondes pour voir le peloton de tête passer, reconnaitre notre champion, mais ça va trop vite.
« Ne te fais pas du mal, continue cocotte ». Une pensée me traverse l’esprit : « et si tu faisais demi tour maintenant, tu aurais déjà fait une bonne balade ? » « ah oui mais ça va se voir » « oui et en plus, ça monte par là, alors que si tu continues, ya encore de la descente » je vote côté descente et puis quand même, ça ne se fait pas.
La même idée me retraverse l’esprit plus loin, car là, j’ai commencé à réaliser que chaque fois que je descendais, c’était pour mieux le remonter plus tard ! mais non, il faudrait que j’attende le bus encore plus longtemps et ce n’est toujours pas moral, et puis on ne me laisserait pas faire.
Il y a de belles lignes droites et en descente, quel régal, je ne bourrine pas, je patine à une fréquence de koala mais c’est que je cherche la double poussée et à être la plus fluide possible, en phase avec la musique et sans m’essoufler. Le bonheur. Je pourrais presque faire illusion.
Je commence à compter non pas en kilomètres mais en zones de ravitaillement. banane, céréales, eau, jus de pomme, un truc imbuvable qui fait des trous dans l’estomac dont je ne citerai pas le nom. 300m avant, une bache tendue pour qu’on jette nos bouteilles vides, 300m après, une autre bache pour jeter ce qu’on veux après le ravitaillement. Je n’y ai jamais vu de patins
70km en 3h30, 20km/h de moyenne, sur la partie la plus facile, tu parles d’un exploit. « Ah bah quand même ma fille, ya 15 jours, t’en pouvais plus à 30km » oki, super, après tout, maintenant, ce n’est que du bonus. Je pensais au mieux m’inscrire aux 70km sans l’intervention des loustics.
« Allez, peut être encore 10km ou allez, tiens, jusqu’à 90km et dès que ça monte, j’arrête. »
80km en 4h toujours 20km/h
Avec les litres d’eau que je bois (oui, je suis un vieux modèle, 15 litres au 100), aucun besoin de pause pipi quand même.
90km en 5h40, on commence à sentir le net fléchissement … et pourtant, le plus dur reste à faire !
Je ne vous parle pas de ces petites frappes de raidillons de 200m ridicules mais qui grimpent à casser les pattes, les jambes envoient au cerveau un STOP ou « SHUTDOWN IMMEDIATE ».
Et ben là yen a marre. Je trouve un banc et je m’arrête pour manger ma banane, mes céréales et boire mon coup, au soleil.
« et bien ma fille, là, t’es bonne pour le car, mais tu ne vas pas rester là, t’as même pas ton bouquin »
allez, j’avance tant que je peux en attendant le car.
Après tout, je suis en mode touriste, à fond avec mes lunettes de soleil de star. J’ai bien dansé la macarena en passant à une zone de ravitaillement qui passait le morceau.
Une jeune fille m’a regardée un peu interloquée, j’ai dû passer pour une folle. Une autre zone relais et je salue la foule en délire (ya une même une photo mais là, le site est en rade
Ensuite, un bon faux plat des familles bien long, pas trop graton, que j’ai de la chance de prendre avec le bon mouvement et avec la bonne musique dans les oreilles. Il faut dire que je me suis rappelée que je
n’avais pas pris de sucre rapide depuis le départ ! pate de fruit, jus de pomme et hop, c’est reparti.
ça monte, mais tranquille. Tout de même, quand est-ce qu’il arrive ce fichu panneau des 100km ?
Ah bah non, c’est carrément une grosse bannière, genre t’es arrivé.
« Cool, je peux/dois m’arrêter ? Ah non, c’est pas fini ?! J’ai gagné le droit de rejouer ? bon ben oki alors, si vous le dites. » Bon maintenant, il reste 11km, une 1/2 rc, faut pas délirer non plus, c’est jouable.
Ce que je n’avais pas imaginé, c’était la hantise des descentes dans ces derniers 20km. Bah oui, elles étaient trop petites pour s’amuser et tout ce qu’on redescendait, c’était pour le remonter, et là, pas glop du tout !
Je n’ai pas souvenir de la pancarte des 110km, mais je commence à doubler du monde, certains 111km mais surtout ceux qui se sont lancés dans les 35km, ils ont un t-shirt pour être facilement identifiés. Doubler me donne toujours un peu de pèche, c’est si rare !
Quel plaisir à la pancarte « Noch 5km », on arrive en ville et là, quoi qu’il arrive, je peux finir, en catchant s’il le faut
Mais je me souviens d’une belle descente à l’aller ce qui signifie … au secours … ma oui, au retour cela sera une montée ! Et elle n’en finit plus cette côte de 7 km car oui, tous les gps s’accordent pour dire qu’après la pancarte, il y avait 7 ou 8 km et non 5km.
Et là, ce qui est fantastique, comme tout au long du parcours d’ailleurs, les passants, les bénévoles qui gardent les carrefours t’expriment tous leur respect alors que tu es dans les derniers mais ils apprécient l’effort. Dans les derniers km, les hochements de tête se font plus marqués.
Petit cadeau pour la fin, l’arrivée est en descente, et je retente de sortir la double poussée, en tout cas, je me refais un petit plaisir pour passer la ligne d’arrivée au plus à fond que je peux en soignant ma poussée.
Mon précédent record était 98km avec un dénivelé raisonnable lors d’une étape des 1000km, aidée par fanfan dans les côtes et à l’abri du peloton le reste du temps.
Là, j’ai fait 113 ou 114km dont 92% alone like a dog en 6h24, ridicule. Mais cela me fait un temps de référence si des fois j’y retourne un jour.
Il va me falloir trouver un autre délire !
‘Tomette sur 100% Quad
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